Les croix de chemin.

Les croix de chemin sont des monuments religieux de tradition chrétienne qui se sont développées depuis le Moyen Âge (XIe siècle) avec l'émergence de l'art roman. Ces croix monumentales atteignent leur apogée au XVIe siècle avec un accroissement des croix de chemins et des calvaires au cours du XIXe siècle.

 

De formes et dimensions variées, elles sont construites avec des matériaux qui ont évolué dans le temps (le bois ou la pierre ont été remplacés par le fer forgé, voire la fonte ou le ciment). Elles agrémentent les bourgs, les hameaux et les villes, ainsi que les routes et les chemins de nos campagnes. Initialement placées aux croisées des chemins pour guider le voyageur et le protéger de l’inconnu et des mauvaises rencontres, elles deviennent des lieux de rassemblement pour prier lors des fêtes religieuses ou pour solliciter la grâce de Dieu contre les fléaux de tous genres (guerres, épidémies, incendies, sécheresses).

 

Typologie des croix  (source wikipedia)

L’érection d’une croix peut être motivée par des intentions variées :

 

  • croix de carrefour, implantée à la croisée des chemins, guide le voyageur ; également élevée sur les places, les ponts, les cols,  elle restent le témoin de la christianisation ;
  • croix de fondation : souligne la prise de possession d’un territoire ou d’un site.
  • croix de dévotion publique : c’est la croix de chemin typique qui indique un lieu de rassemblement et de prière, plantée le plus souvent à une croisée de chemins.
  • croix de commémoration : elle rappelle un événement historique ou marquant, une fête religieuse, la présence d’un groupe ou d’un lieu de culte sur un site.
  • croix « mémoriale » érigée en ex-voto sur le lieu d'une mort brutale, ou au contraire d'un événement heureux ;
  • croix du culte des morts : croix de cimetières, d'épidémies (« croix de peste ») ;
  • croix reposoir avec une dalle assez large sur laquelle on posait le cercueil pour l'exposer le temps d'une pause pour les porteurs de bière.
  • croix de processions : croix des Rameaux, du Saint Sacrement, des Rogations, les croix vouées au culte des saints ;
  • croix de pèlerinages qui le plus souvent ne marquent pas une étape sur un trajet, mais rappellent le pèlerinage du donateur ;
  • croix de mission érigée en souvenir d'une mission, après la tourmente révolutionnaire, où il fallut, pour les représentants de l'Église catholique romaine, restaurer la pratique religieuse.
  • croix votive élevée en reconnaissance pour un vœu accompli ;
  • croix de bornage servant de limites à l'entrée et sortie des villages. 

 

Les éléments constitutifs d'une croix de chemin (source wikipedia - Livio Dalle Grave)

 

Un exemple de croix simple en pierre

Un cas concret : la croix en fer forgé aux instruments de la crucifixion, rue de l’Eglise à AGNAC

 


Détails de la partie supérieure

Détails de la partie centrale

 


Repère

Ornement

Symbole

1

Le coq

le coq symboliserait par son chant le reniement de saint Pierre.

2

Le titulus

dans l'antiquité : écriteau attaché au coup d'un condamné.

Traditionnellement, le titulus porte l’abréviation « INRI », en référence à la mention latine « Iesus Nazarenus Rex Iudaeorum », qui signifie « Jésus de Nazareth Roi des Juifs »

Ici, Jubilé 1879 marque la célébration d’une année sainte qui coïncide avec l’érection de la croix.

3

Le soleil (à gauche) et la lune (à droite)

le soleil illustré par un disque rayonnant et la lune partiellement représentée, symbolisent l’éclipse solaire qui assombrit les cieux au moment où Jésus expira son dernier souffle. Pris au second degré, le soleil symboliserait le Nouveau Testament, tandis que la lune illustrerait l’Ancien Testament.

4

L’aiguière

l'aiguière avec laquelle Ponce Pilate se lava les mains

5

Les tenailles (à gauche) et le marteau (à droite)

Les tenailles et le marteau représentent les outils utilisés pour retirer les clous des mains et des pieds de Jésus au moment de détacher le corps de la croix.

6

Le calice

le calice au centre de la croix rappelle de l'Eucharistie.

7

La couronne d’épines

la couronne d'épines , symbole de la condamnation de Jésus en tant que Roi des Juifs . Il en a été coiffé par ses bourreaux.

8

La branche d’Hysope

à gauche la branche d'Hysope ou lance au bout de laquelle se trouve l'éponge imbibée de vinaigre dont le centurion s'est servi pour humecter les lèvres du Christ agonisant (ici l'éponge a disparu)

9

La lance

à droite la lance employée par le centurion Longin pour percer le côté droit de la poitrine de Jésus, d’où s’écoulèrent le sang et l’eau, signes de la mort.

10

La tunique

sous le calice se trouve la tunique de Jésus que les soldats se disputèrent aux dés.

11

La main

Le glaive

Le fouet

Le sceptre

sous la tunique on remarque :

-      une main , celle du Grand Prêtre qui gifla Jésus

-     un faisceau comprenant le glaive dont se servit Pierre pour trancher l'oreille du légionnaire Malchus serviteur du grand prêtre, le fouet de la flagellation, le sceptre dérisoire sous forme de roseau .

12

La bourse

en dessous se trouve la bourse qui contenait les trente deniers, prix de la trahison de Judas.

13

L’échelle

derrière ces éléments, l'échelle qui a servi pour la descente de la croix.

14

Le crâne et les tibias

au bas du fût, la tête de mort avec les deux tibias croisés. Selon la tradition chrétienne, Jésus aurait été crucifié à l'emplacement du tombeau d'Adam. Le crâne de "pirate" fait donc référence au premier homme dont le péché aurait été racheté par le sacrifice du Christ.

En bas du fût, 4 consoles cerclées reposant sur un piedestal carré

D’autres symboles peuvent être visibles sur d’autres croix mais absents sur la croix d'AGNAC :

-          Une corde avec laquelle le traite Judas se pendit

-          Les 3 clous de la crucifixion

-          Les dés avec lesquels les soldats jouèrent la tunique

-          l'Agneau couché sur une bible symbolisant le sacrifice de Jésus, sa souffrance et sa résurrection

 

 

 

Les croix recensées en Haut Agenais (source Livio Dalle Grave)

 

Il n’existe aucun recensement exhaustif de cet élément particulier du patrimoine religieux, ni dans la base Mérimée du ministère de le Culture ni dans celle de l’Observatoire du patrimoine religieux. Il y avait à un sérieux vide à combler.

 

Livio Dalle Grave, adhérent de PHP, collectionneur notoire et féru de patrimoine, s’est particulièrement intéressé aux croix de chemins et notamment celle en fer forgé située rue de l’Église à AGNAC, son village natal, dont la riche ornementation l’a toujours intrigué.

 

Il a entrepris de recenser toutes les croix existantes dans les deux anciens cantons de Fumel et Tournon d’Agenais. Ainsi de communes en communes, avec l’aide de Rachel Stevens, il a repéré les lieux et sites, fait des photos, pris des mesures, noté les matériaux utilisés et cherché à savoir pourquoi elles avaient été installées là, à quelle époque, qui les avait construites ou forgées, qui les avait financées, ...autant de questions souvent restées sans réponse.

 

57 croix ont ainsi été recensées dans 16 villages sur les 19 existants dans le périmètre choisi.

Comme celle de Sauveterre-la-Lémance  (source site Monumetum) :

 

Croix de chemin, en fer forgé du XVe siècle, située sur le chemin vicinal de Sauveterre à Lapile.

 

Croix formée de quatre tiges rondes avec quatre longues feuilles d'acanthe repliées décorant chacun des bras et le haut de la croix. Le Christ est encadré dans un compartiment à losange. Sous ses pieds, se trouve une grosse boule ajourée à feuillages. Le tout repose sur un socle de pierre.

 

Classement par arrêté du 20 septembre 1910

 

Ou celle plus ancienne, de facture très simple en pierre, située en face de la ferme de Galetou sur les hauts de Condat (pech Grabillé)

(source site fumeloisnaturepatrimoine.blogspot.com)